Les mers de Chine
Conférence présentée par Didier Ortolland, diplomate spécialisé en droit de la mer, membre élu du Comité des Finances de l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM), assesseur à la Cour nationale du droit d’asile.
Didier Ortolland est l’auteur de l’ouvrage « Les mers de Chine : géopolitique, confrontation et droit international » publié aux éditions L’Harmattan (2024). Médaille de l’Académie de marine, mai 2024.
La conférence débute par un rappel géographique (pourquoi LES mers de Chine ?) qui s’appuie aussi sur des références historiques. En effet Mer de Chine méridionale et Mer de Chine orientale ont une histoire différente depuis notamment le XIXème siècle, et ne présentent pas aujourd’hui les mêmes problèmes sur la scène internationale :
– Question de souveraineté revendiquée pour les îles Paracel et Spratley,
– Questions de définitions et de juridiction par ailleurs: qu’est-ce qu’une île ? Qu’est-ce qu’un archipel ? Quelle est la délimitation du plateau continental ? Quelle est la différence entre un « rocher » et un « haut-fond découvrant » ?
Ces questions spécifiques liées à la géographie sont aussi tributaires des évolutions du droit international, et de la Convention des Nations-Unies sur le droit de la Mer (1982), ratifiée notamment par la Chine avec des réserves, et aujourd’hui dont certaines dispositions sont contestées par la Chine. En matière juridique, il sera utile aussi de se référer à la sentence de la Cour permanente d’arbitrage de 2016 sur le différend entre la Chine et les Philippines.
Au-delà de l’exploitation des ressources halieutiques déjà anciennes, sont apparus des enjeux plus récents liés à l’importance du commerce maritime dans l’économie mondiale, aux perspectives d’exploitation des minerais dans les grands fonds marins, et à la dépendance pour les informations mondiales circulant dans les câbles sous-marins.
Ces questions particulièrement sensibles dans cette région des mers de Chine, abordées de manière très détaillée dans l’ouvrage, ont été présentées durant la conférence, en soulignant les évolutions produites depuis la Guerre froide jusqu’à la période contemporaine qui est dominée par la montée en puissance de la Chine et la rivalité avec les Etats-Unis. En effet, la chine souhaiterait « interdire » ici (dans une zone qu’elle considère comme sienne) la libre circulation des navires étrangers, et notamment occidentaux, – américains, français, japonais -. De plus ses « navires de pêche » de plus en plus nombreux et de plus en plus puissants, mènent des opérations d’intimidation vis-à-vis des navires des Etats voisins (Philippines, Malaisie).
La « ligne des neuf traits » qui sont désormais dix ( ! ) , base ancienne des revendications chinoises (elle est apparue en 1947 à l’époque du Guomintang), est aujourd’hui « doublée » par une deuxième chaîne d’îles plus au large qui permettrait à la Chine certes d’avoir un libre accès total au Pacifique, mais surtout serait un réel obstacle au principe de libre circulation maritime, et isolerait complétement le Japon et la Corée du sud.
Au-delà de ses espaces « proches », la Chine revendique désormais de « nouvelles frontières maritimes » quasiment sur l’ensemble de la planète, notamment avec des tentatives « d’accaparement » dans les régions polaires et la construction de navires brise-glaces.