En Corée du nord, la dénucléarisation entraînerait la chute du régime

Photo A. LAnkov par daveHazzan.com

Entretien avec Andréï Lankov

A. Lankov, historien russe a étudié à Pyong Yang dans les années 80, enseigne aujourd’hui à l’université Kookmin de Séoul. Est considéré comme un des meilleurs experts de la Corée du nord.

La situation économique s’est beaucoup améliorée ces 15 dernières années et bénéficie à l’ensemble du pays, mais accroit encore les inégalités. Sous Kim Il-sung la nourriture était gratuite pour tous et rationnée. Sous Kim Jong-Il, il y a eu beaucoup de morts de famine. Sous Kim Jong-Un, il n’y a plus de rations et les gens ont « de réelles opportunités e gagner de l’argent pour acheter à manger ».
A partir de 2013, Kim Jong-Un a mis en place une nouvelle politique agricole (la terre reste propriété de l’Etat, mais la famille d’agriculteur conserve une part de la récolte) et depuis 2014, il a modifié le système industriel.

Si le régime s’effondre, le pays serait réunifié et n’aurait aucune chance face à la concurrence sud-coréenne. L’arme nucléaire est chère, mais moins coûteuse qu’une force conventionnelle et plus efficace. Et ensuite, le pays pourra consacrer ses ressources à l’économie civile. La Corée du nord a remarqué que si Saddam Hussein ou Kadhafi n’avait pas abandonné leur programme nucléaire sous pression de l’Occident, ils n’auraient pas été attaqués par l’Occident qui par ailleurs n’est pas une garantie fiable (cfl’Ukraine et la Crimée en dépit de l’intégrité territoriale promise dans le Mémorandum de Budapest en 1994, en échange de l’abandon de l’arsenal nucléaire soviétique).

La dénucléarisation de la Corée du nord serait sa condamnation à mort.

La Chine ne peut pas « lâcher » la Corée du nord car elle la condamnerait à la famine, à un soulèvement populaire et donc à l’effondrement et à une réunification sous contrôle du sud. La Chine tient à la stabilité de la péninsule. La Chine ne tire pas de bénéfice économique, mais stratégique.

Des purges massives ont eu lieu dans la bureaucratie sécuritaire, mais on n’a pas touché aux gestionnaires économiques.

27 & 28/11 – Harold Thibault –  Le Monde (extraits)