La visite du président chinois au Brunei.
Avec ses 436 000 habitants, une superficie de 5700 km², le long de la côte nord de l’île de Bornéo, coupé en deux par une bande de territoire de la Malaisie, le sultanat du Brunei, ancienne colonie britannique devenue indépendante en 1984 attirerait peu l’attention des médias s’il n’était riche en hydrocarbures. La visite du Président chinois Xi Jin Ping, le 18 novembre 2018 dans le cadre de la tournée qu’il a faite après le sommet de l’APEC à Port Moresby, a donné un coup de projecteur sur ce pays et les relations qu’il entretient avec la Chine.
Richissime par ses gisements de pétrole et de gaz exploités par la société anglo-hollandaise Royal Dutch Shell, le Brunei va voir ses ressources pétrolières et gazières se tarir progressivement. Les réserves devraient être épuisées dans une vingtaine d’années au rythme actuel d’extraction. Souhaitant bâtir une économie qui ne repose plus sur le pétrole, le sultan du Brunei, Hassanal Bolkiah s’est tourné vers la Chine pour amorcer une diversification de son économie.
La Chine est le premier investisseur étranger au Brunei avec des investissements totaux estimés à plus de 4,1 milliards de dollars US. Le projet de raffinerie et de complexe pétrochimique de Muara Besar va renforcer cette position. L’investissement chinois a financé la première tranche estimée à 3,4 milliards de dollars. Une seconde tranche est estimée à 12 milliards de dollars. La construction est faite par Hengyi Industries International Pte Ltd, une société privée chinoise qui pense avoir terminé au premier trimestre 2019. Ce complexe doit créer 10 000 emplois et aura une capacité de production de 175 000 barils par jour.
Une joint-venture entre une société chinoise Guangxi Beibu Gulf Port Group et un fonds d’investissement du Brunei Darussalam Assets Sdn Bhd est, depuis l’an dernier, l’opérateur du terminal de container de Muara. Des sociétés chinoises ont aussi investi dans le secteur de l’agriculture et dans celui des télécommunications.
Le sultan du Brunei, âgé de 72 ans est un monarque absolu. Il n’existe au Brunei ni impôts, ni élections, ni parlement. Cependant un conseil de 20 membres nommés aide le sultan dans la gestion du pays. Le sultan Hassanal Bolkiah règne depuis 1967 ce qui fait de lui, après la Reine Elizabeth II, le monarque ayant la plus longue durée de règne. La religion officielle est l’islam avec une pratique plus conservatrice qu’en Indonésie. En 2013 le sultan a instauré la charia qui ne s’applique qu’aux musulmans qui forment 60 % de la population, les bouddhistes représentant 13 % de la population et les chrétiens 10 %.
Il y a sans doute une contradiction entre l’introduction de la charia et le projet de diversification de l’économie appelé Wawasan 2035, (Vision 2035) qui veut transformer en deux décennies le Brunei en un pôle régional financier et de commerce.
Il n’en demeure pas moins que ce petit sultanat qui a peu d’importance comme débouché commercial et dont les ressources, mis à part le pétrole, sont très limitées, est pour la Chine un pion significatif dans sa stratégie des Nouvelles Routes de la Soie et sur son échiquier dans le sud-est asiatique.
Jean-Christian Cady