Le vainqueur des Jeux Olympiques d’hiver serait-il la Corée du nord ?
A la clôture des Jeux Olympiques d’hiver 2018 de PyeongChang, les pays font le compte des médailles qu’ils ont obtenues. Il n’est pas douteux qu’avec 39 médailles toutes catégories la Norvège arrive en première position, suivie par l’Allemagne (31), le Canada (29), les Etats-Unis (23). La Corée du sud, l’organisateur des Jeux est à la 7ème place avec 17 médailles. La France, pour sa part, se trouvant derrière à la neuvième place avec 15 médailles, derrière la Suisse. La Chine est à la 16ème place derrière la République tchèque. Même si certains résultats peuvent surprendre, nombreux seront les pays qui auront – ou se trouveront – de bonnes raisons d’afficher leur satisfaction.
Mais ce n’est probablement ni pour leur parfaite organisation, ni pour les remarquables performances des athlètes, que les Jeux Olympiques organisés par la Corée du sud resteront dans les mémoires. La participation de la Corée du nord décidée à la dernière minute, la venue d’athlètes accompagnés d’une équipe de 229 supportrices appelées parfois pom-pom girls ou« cheerleaders », dont les vestes rouges, les bonnets blancs ont été remarqués dans les tribunes, la présence de Kim Yo-Jong la jeune sœur du leader nord coréen, les ouvertures diplomatiques faites lors des Jeux ont, d’une certaine manière, volé la vedette à l’évènement sportif.
Ouverture ou fausse fenêtre ? Avancée diplomatique ou pure propagande ?
Kim Yo-Jong, la sœur du leader nord-coréen est âgée de 27 ans. Comme son frère, elle a été élevée en Suisse. Elle faisait sa première visite en Corée du Sud. C’était d’ailleurs la première fois qu’un membre de la dynastie dirigeant le Nord se rendait dans le Sud depuis la Guerre de Corée.
Sa venue est lourde de sens, Kim Yo-Jong étant considérée comme une des personnalités les plus influentes du régime.
Elle a transmis au président de la Corée du sud, Moon Jae-In une invitation de Kim Jong-Un à une rencontre au sommet à Pyongyang. Ce signe de réchauffement des relations entre les deux Corées a été reçu par le président sud coréen à la fois avec prudence et optimisme, car cette invitation peut aussi être perçue comme une tentative d’enfoncer un coin entre la Corée du Sud et son plus grand allié: les Etats-Unis.
La Corée du nord a voulu donner des signaux positifs. Mais ils sont ambigus. Rappelons les.
Le défilé militaire dans la capitale nord coréenne qui se tient d’habitude en avril, a eu lieu le 7 février à la veille de la cérémonie d’ouverture des Jeux. A la différence de ce qui se fait d’habitude, les journalistes étrangers n’ont pas été invités. La télévision nord coréenne n’a pas transmis les images en direct. Aucune arme nouvelle n’a été montrée et cette parade militaire n’a duré qu’une heure et demie. Au moment où les tensions entre la Corée du nord et la communauté internationale sont particulièrement vives, on aurait pu penser que la Corée du nord montrerait davantage ses capacités militaires. Il est à noter aussi qu’elle n’a fait aucun essai de fusée ou d’armement nucléaire pendant les Jeux.
L’invitation à se rendre à Pyongyang faite par le leader nord coréen Kim Jong-Un au président sud coréen a aussi été un geste spectaculaire. Mais le président Moon Jae-In peut il accepter ?
Sa marge de manœuvre est très faible. Le parlement sud coréen est hostile à tout rapprochement avec la Corée du nord, pensant que les ouvertures faites dans les années 1990 et l’aide apportée par la Corée du sud à la Corée du nord ont été improductives et ont peut-être donné à la Corée du nord les ressources lui permettant d’accélérer son programme militaire.
Le président sud coréen a répondu à Kim Jong-Un que cette visite ne pourrait avoir lieu que si les conditions étaient réunies et notamment si des assurances pouvaient être données par la Corée du nord sur son programme nucléaire.
Cela apparaît peu probable d’autant plus que les sanctions de la communauté internationale à l’égard de la Corée du nord viennent de monter d’un niveau, la marine américaine ayant reçu l’ordre du Président Trump d’intercepter toute livraison faite en haute mer à des navires nord coréens. A la différence du président sud coréen naturellement porté au dialogue avec le nord, le président Trump veut accroître la pression sur le dictateur nord coréen. Etait très éloquente à cet égard l’attitude du vice-président américain Mike Pence qui, pendant le déroulement des Jeux, n’a pas adressé un mot à Kim Yo-Jong, la sœur du leader nord coréen qui était juste derrière lui dans la tribune.
A l’occasion des Jeux Olympiques d’hiver, pour la première fois depuis 1953, la Corée du nord et la Corée du sud ont été réunies sous le même drapeau. Le président sud coréen et la sœur du dictateur nord coréen ont encouragé et applaudi la même équipe réunissant le nord et le sud. L’image est spectaculaire mais il est douteux qu’elle soit suivie d’avancées. De toute évidence Kim Jong-Un ne veut pas abandonner ses programmes nucléaires et balistiques. Et, par la voix de Mike Pence, les Etats-Unis ont déclaré le 23 février après une réunion avec le Président Moon, que ce n’est que lorsque les programmes nucléaires et balistiques de la Corée du nord seront abandonnés de manière irréversible et permanente, que la communauté internationale pourra commencer à négocier la levée des sanctions.
Même si, comme cela est très probable, la participation de la Corée du nord aux J.O. n’aboutit à rien de concret sur le plan diplomatique, il n’en demeure pas moins que le dictateur nord coréen a fait preuve d’une grande habileté pour réussir un « coup médiatique » qui a marqué les esprits.
Jean-Christian CADY