Actualité de décembre 2022
Le Ministre australien du Commerce et du Tourisme, Don Farrell, a entamé début décembre une visite de deux semaines en Europe et au Royaume Uni. Il la débute à Paris et en Alsace avec son homologue Olivier Becht. Il se rendra ensuite à Bruxelles, Berlin et Londres. Après la rencontre Macron-Albanese au sommet du G20 à Bali, l’objectif est de renouer une relation bilatérale apaisée, et également de conclure un accord de libre-échange avec l’UE (négociations entamées depuis 2018). « Nous cherchons à la fois des partenaires pour investir dans les mines et des clients » (Don Farrell). La question du contrat des sous-marins toujours en suspens a-t-elle été évoquée ???
Annulée en octobre 2020 en raison des conditions de censure et de « réécriture d’un nouveau récit national » imposées par le gouvernement chinois (cf article paru sur le site de l’IP le 18 novembre 2020 : « Gengis Khan objet de scandale diplomatique au Musée de Nantes »), le 2 décembre on apprend par voie de presse que l’exposition« Gengis Khan, le grand échange mongol » se tiendra en Octobre 2023 avec la participation du Musée d’Oulan-Bator, d’institutions américaines et européennes et du musée de Taïwan.
Le 6 décembre, Joe Biden s’est rendu à Phoenix sur le site en construction de TSMC qui porte ses investissements aux Etats-Unis de 12 à 40 milliards 4US$. TSMC va construire 2 usines en Arizona et créer 4500 emplois pour fabriquer des composants électroniques de dernière génération. Pour Taïpeh, c’est une « assurance » contre la Chine continentale ; pour les USA, c’est la garantie de ne pas dépendre uniquement d’usines installées à des milliers de kms.
Le 7 décembre, le gouvernement de Pékin a annoncé un allègement spectaculaire de sa politique « Zéro Covid » après les manifestations massives de milliers de Chinois dans tout le pays (au moins 18 villes concernées) qui se traduisaient par une remise en cause de la stratégie gouvernementale, voire un appel à la démission de Xi Jinping et du PCC. Le virus est subitement devenu moins dangereux… et tests et confinements sont allégés, les voyages inter-provinces sont possibles. Cela suffira-t-il à permettre une remontée de l’économie, et des importations et exportations tombées au niveau le plus bas depuis le début de 2020.
Après 17 mois d’un mandat présidentiel tumultueux, le Congrès destitue le 7 décembre, par 101 voix sur 130, Pedro Castillo qui est arrêté dans la foulée pour « avoir tenté un coup d’état ». Dina Boluarte, avocate de 60 ans et vice-présidente, lui succède devenant ainsi la première femme chef d’état du Pérou et ce – normalement – jusqu’au 26 juillet 2026, date des prochaines élections. Elle fait appel au dialogue dans un Congrès divisé et veut lutter contre la corruption tout en représentant les populations marginalisées et vulnérables.
Les manifestations d’une ampleur inédite dans une dizaine de villes depuis plusieurs semaines traduit au-delà d’un « véritable rejet du modèle de société chinois chez les jeunes » (à rapprocher du mouvement « Rester couché » (Tang Ping) déjà observé l’an dernier), un ras-le-bol de toutes les générations qui a été sous-estimé par les polices locales. A Shanghai, il y aurait eu, lors du premier confinement de 2 mois, plus de décès consécutif à un suicide qu’au Covid-19. Les revenus des Chinois sont à 40% du PIB contre 40 à 70% dans les pays développés. « La société en Chine est aujourd’hui une sorte de cocotte-minute prête à déborder » (Emmanuel Veron)….
Le 9 décembre, les bourses chinoises se sont redressées après l’annonce du relâchement de la politique sanitaire en Chine populaire. L’indice Hang Seng de la bourse de Hong Kong a bondi de 33% par rapport au début de novembre, le CSI de Shanghai et de Shenzhen a repris 12%.
Signé le 9 décembre à Bruxelles entre Josep Borrell (Haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères) et Antonia Urrejola (Ministre chilienne des Affaires étrangères), l’Accord commercial UE – Chili vise à sécuriser les approvisionnements stratégiques de l’Europe, notamment en lithium (le Chili fournit actuellement 40% de l’approvisionnement mondial). Il modernise ainsi le texte signé il y a 20 ans. Il porte sur l’intensification des relations commerciales et la diversification des approvisionnements en matières premières, dont le lithium actuellement tellement recherché et dont les pays andins notamment sont producteurs. Cet accord est le deuxième de cette génération après celui signé avec la Nouvelle Zélande en juin dernier. La commission est en train de finaliser un accord similaire avec le Mexique. Le texte cependant n’entrera en vigueur qu’après l’examen par les Etats-membres et le Parlement européen, puis la validation par les Parlements des 27 Etats membres. A noter cependant que cet accord politique (qui comporte d’autres volets, notamment agricoles), doit être confirmé juridiquement après la ratification des 27 parlements nationaux.
Pour la première fois depuis 2016, Xi Jinping entame une visite de 3 jours (9-11 décembre) en Arabie saoudite en présence des voisins du Golfe, de l’Egypte, de l’Irak et de la Tunisie. A noter que si l’Arabie saoudite est le premier producteur mondial de pétrole, la Chine en est le premier consommateur. Mohammed Ben Salman a assuré que « les pays du Golfe resteraient des fournisseurs sûrs et crédibles d’énergie ». Une quarantaine d’accords bilatéraux ont été signés dans différents domaines (hydrogène, logement, transport…). Depuis 2020, la Chine est le premier partenaire commercial des six pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG), supplantant dans certains secteurs les Européens ou les Américains, notamment dans le domaine de l’armement et des technologies.
Le premier avion de ligne « made in China », le C 919 a été livré le 9 décembre à China Eastern. Le vol inaugural devrait avoir lieu au début de 2023. Moyen-courrier de 164 passagers, il est considéré comme la copie asiatique de l’A320néo et du 737 Max. Lancé en 2017, le programme a pris du retard, a été certifié en septembre 2022 par les seules autorités chinoise et donc ne peut voler ni en Europe, ni aux Etats-Unis. La commercialisation assurée par la société d’Etat CCAC, avec 800 contrats devraient réduite la dépendance chinoise à Airbus, même si une nouvelle commande portant sur 292 A320neo a été passée auprès de Airbus en juillet 2022 par la Chine.
Le 9 décembre, un communiqué commun des gouvernements britannique, italien et japonais annonce la production en commun pour 2035 d’un chasseur « nouvelle génération » par les industriels des 3 pays : BAE Systems, Leonardo et Mitsubishi Heavy Industry dans le cadre du programme Global Combat Air Programme (GCAP). Cet appareil fera suite aux F 15 américains et à l’Eurofighter européen. C’est une situation nouvelle avec un partenariat inédit avec les Japonais (qui étaient une chasse-gardée américaine quasi exclusive depuis 1945) et sans les Allemands. Profitant de leur implication dans l’AUKUS, les Britanniques ont aussi fait accoster au Japon pour la 1ère fois leur porte-avion HMS Elizabeth en septembre dernier, symbolisant ainsi la coopération en matière de sécurité et de défense entre les deux Etats avec le soutien.
La Chine est accusée par l’Inde de tenter de « changer unilatéralement le statu quo » sur la frontière himalayenne après des affrontements durant la semaine du 5 au 10 décembre. Les Chinois accusent des soldats indiens d’avoir franchi illégalement la frontière.
7 des 20 premières places financières mondiales se trouvent le 10 décembre dans la région Asie : Chine (4), Japon, Corée du sud et Singapour. Profitant des conséquences de la crise sanitaire, Singapour accède pour la première fois à la troisième place devant Hong Kong et n’hésite pas à durcir les conditions de résidence des étrangers. Si parmi les 119 places financières mondiales, treize sont chinoises, l’avenir de Hong Kong suscite des interrogations malgré ses atouts. Tokyo, le 8 décembre, désormais à la 13ème place derrière Séoul essaye aussi d’enrayer sa chute.
Après avoir imposé de nouvelles interdictions d’importation de produits alimentaires, la Chine a le 12 décembre de nouveau violé la zone de défense aérienne de Taiwan avec 21 avions dont 18 bombardiers H-6. Serait-ce aussi une façon pour Xi Jinping de faire oublier sa désastreuse politique du zéro Covid et de rallier les nationalistes à sa cause ?
La Chine lance le 12 décembre une procédure contre les Etats-Unis devant l’OMC au sujet des restrictions d’exportations de puces. Pour la Chine, il s’agit d’un obstacle au commerce international de marchandises ; pour les Américains, il s’agit d’une question de sécurité nationale, hors du champ de compétences de l’OMC. Il sera intéressant de suivre l’évolution de ce contentieux, dans une organisation internationale du système onusien largement « infiltrée » par les Chinois (CF l’article paru sur le site de l’Institut du Pacifique le 20 novembre 2019
Un accord est conclu le 13 décembre entre le consortium japonais Rapidus formé de huit industriels locaux (dont Toyota et Sony) et de l’Américain IBM pour produire en masse au Japon des semi-conducteurs d’une taille de 2 nanomètres. Le Japon, premier producteur de semi-conducteurs à la fin des années 80, a perdu peu à peu cette place prépondérante. Aujourd’hui sa production représente 17% de la production mondiale, même si avec le concours de TSMC (Taïwan), il maitrise la production de puces de 40 nanomètres et s’appète à celle de 20 nanomètres aux applications multiples (médical, espace, transport…). Dans ce domaine, la Corée du sud et Taïwan, capables de produire des puces de 3 nanomètres sont leaders. La production de puces est désormais un enjeu de sécurité économique. La Chine continentale produit aujourd’hui environ 15% des puces mondiales, mais de qualité moyenne. Dans le cas d’une tentative de prise de contrôle de Taïwan avec blocus de l’île, c’est l’ensemble des chaînes de production du monde qui seraient bloquées.
Les résultats définitifs des élections législatives organisées le 13 décembre à Fidji tardent à être connus. Le Chef de l’opposition, ex-chef du gouvernement, le Général Sittveni Rabuka serait favori devant le Premier Ministre sortant, Frank Bainimarama à qui il reproche son rapprochement avec la Chine. Mais le général (à l’origine d’un putsch contre le gouvernement élu, puis contre l’exécutif en 1987) a été convoqué le 16 décembre par la police après avoir demandé l’arrêt du processus électoral en raison d’anomalies dans le décompte des voies, et l’intervention de l’armée.
Des dirigeants de l’Union européenne et de l’ASEAN se rencontrent à Bruxelles le 14 décembre pour fête le 45e anniversaire de leurs relations qu’ils veulent renforcer par une coopération en faveur du commerce et du multilatéralisme. Les pays membres de l’ASEAN, cherchent un contrepoids à l’influence de la Chine dans la région, et notamment dans la Mer de Chine méridionale : ils cherchent aussi à échapper à la rivalité sino-américaine. Les Etats européens, de leur côté, sont désireux de renforcer leurs liens avec des Etats riches en ressources naturelles (gaz naturel, métaux rares …), même si leurs échanges sont déjà importants : en 2021, l’UE et l’ASEAN étaient le troisième partenaire commercial l’un de l’autre. Leur relation, avec le financement du Global Gateway, se voudrait un concurrent du projet BRI chinois. La question politique liée à la guerre russo-ukrainienne a rendu difficile la rédaction de la déclaration conjointe qui a finalement mentionné que « la plupart des membres » condamnent la guerre en raison de « différentes évaluations de la situation et des sanctions ».
La politique de dépistage systématique du COVID, puis le traçage des déplacements le 13 décembre, sont est abandonnés en Chine à la suite des manifestations générées par les confinements à répétition et les tests multiples (parfois incohérents !). Cependant l’explosion des cas de COVID, même s’ils sont difficilement vérifiables, conduit la population à se terrer par crainte de la contagion. Le 15 décembre la revue The Beijinger faisait état d’un sondage auprès d’expatriés selon lequel 9% avait contracté le COVID avant le 1er décembre, et 58% depuis cette date. Le 17 décembre, toutes les écoles de Shanghai ont décidé de passer en distanciel sauf les classes à examen.
Les menaces perçues au Japon du fait de la Chine, mais aussi de la Corée du nord et de la Russie, ont conduit le Japon à revoir une nouvelle fois sa doctrine militaire. Il a été décidé le 16 décembre de doubler le budget militaire du pays d’ici à 2027, passant de 1% à 2% du PIB. Cette décision s’accompagne d’achats d’armement (500 Tomahawk américains, missiles de longue portée SM-6, développement d’un futur avion de combat avec les Britanniques et les Italiens) et surtout d’un renforcement de leurs forces sur les îles les plus proches de Taïwan et d’une augmentation des troupes américaines stationnées à Okinawa de 2000 à 3000 soldats.
En réaction au budget militaire nippon et après avoir testé avec succès le 16 décembre un moteur à combustible solide de forte poussée, la Corée du nord a procédé le 18 décembre au tir de deux missiles balistiques de moyenne portée en direction de la mer du Japon. Etaient-ils équipés de ce carburant solide ?
Du 7 au 19 décembre se tenait à Montréal la COP15, 15ème conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique sous la présidence chinoise de Huang Runqu, ministre de l’environnement en présence des représentants de plus de 190 Etats. L’accord de Kunming-Montréal signé en dernière minute est un compromis qui vise notamment à préserver 30% de la biodiversité des terres et des mers au niveau global (c’est à peu près l’équivalent de l’Accord de Paris sur le réchauffement climatique). Aujourd’hui, environ 17% des terres et 8 % des mers seulement sont protégées.
Anwar Ibrahim, nouveau Premier ministre a obtenu le 19 décembre un vote de confiance au Parlement. Ce « revenant » en politique, âgé de 75 ans, ancien ministre des finances de Mahatir Mohamad dans les années 90, se présente comme le meilleur rempart face au parti islamiste (PAS), alors qu’il est à l’origine de « l’islamisation » de la société malaisienne dans les années 80. Alors que le PAS progresse rapidement, que la communauté chinoise s’inquiète et cherche à quitter le pays (de 38% de la population en 1947, elle est passée aujourd’hui à 22%), les dynasties royales se mobilisent dans un pays qui n’est plus entre les mains de la coalition conservatrice de l’UNMO comme ce fut le cas de 1957 à 2018.
Du 21 au 27 décembre, la Chine et la Russie conduisent des manœuvres navales conjointes en Mer de Chine orientale avec « plusieurs » navires de guerre russes. Sont prévus des tirs de missiles et d’artillerie ainsi que des exercices de lutte anti-sous-marine. Ces opérations suivent les annonces de manœuvres aériennes sino-russes en Mer de Chine orientale et en Mer du Japon en novembre dernier.
Les Fidji ont un nouveau premier ministre après les 16 ans de règne de Frank Bainimarama. Lors d’un vote secret le 24 décembre, le parlement a confirmé par 28 voix contre 27 Sitiveni Rabuka au poste de Premier ministre, la Chine perdant ainsi un de ses soutiens en Océanie puisque le nouveau promu reviendrait vers les alliances traditionnelles avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Mis d’aucuns craignent un coup d’état rampant …
Un pas de plus dans les bras de la Chine ? Lors d’une visioconférence le 30 décembre, Vladimir Poutine a dit à son homologue chinois vouloir renforcer la coopération entre les forces armées des deux pays pour contribuer à leur sécurité … Etonnant quand la Russie sous ce prétexte attaque un de ses voisins et souhaite l’exterminer comme V. Poutine a déjà su le faire notamment pour la Tchétchénie et la Syrie. Serait-ce aussi un moyen de renforcer, voire rééquiper son armée qui a beaucoup de soucis sur le terrain ? Drôle d’hymne antioccidental quand nombre de Russes (et de Chinois) font leurs études, leurs emplettes en Occident en dehors de ceux qui fuient leur terre natale.
A quoi bon masquer la réalité de la mortalité suite au Covid-19 ? Pour ne pas avoir à le faire, la Chine annonce le 30 décembre qu’elle va le « reclassifier » le 8 janvier en maladie infectieuse de catégorie B… Elle va donc rouvrir ses frontières puisque le risque se trouve ainsi « réduit » et de s’insurger contre les pays qui veulent rétablir les tests à leurs frontières. Au fait, comment s’est transmise la pandémie dans le monde ?
Alors que le Conseil de sécurité de l’Onu dans une résolution inédite vient de demander la libération immédiate d’Aung San Suu Kyi, la junte militaire par le truchement d’un « procès » ( ?) qui s’est étalé sur 18 mois, vient de la condamner le 30 décembre à 7 ans supplémentaires d’incarcération, ce qui fait 33 ans au total. Inutile de rappeler ce qui lui est reproché si ce n’est de vouloir faire du Myanmar un état démocratique, tous les arguments étant bons pour la faire taire.