Conclusion d’un nouvel accord de libre-échange entre les Etats-Unis, le Mexique, et le Canada.

L’accord de libre-échange nord américain (ALENA) qui lie les Etats-Unis au Mexique et au Canada depuis 1994 avait été dénoncé en juillet dernier par le Président Trump.

Donald Trump avait fait de la dénonciation ou de la renégociation de l’ALENA un pilier de sa campagne électorale. En effet il déclarait que cet accord était injuste envers les travailleurs américains et l’accusait d’avoir été à l’origine de pertes de millions d’emplois américains en particulier dans le secteur automobile, dans cette zone géographique appelée le « Rust Belt » où ses électeurs sont particulièrement nombreux.

Il n’en demeurait pas moins que de 1994, année de création de l’ALENA, à 2017 le commerce de marchandises entre le Canada et les États-Unis avait plus que doublé, et était devenu neuf fois plus élevé entre le Canada et le Mexique.
Les Etats-Unis sont parvenus à un accord de principe avec le Canada le 30 septembre, une demi-heure avant l’expiration de la date-limite imposée par les Etats-Unis, qui permettra au Canada de rejoindre le pacte conclu en fin août dernier entre les Etats-Unis et le Mexique.

« L’accord renforcera la classe moyenne et créera de bons emplois bien rémunérés ainsi que de nouvelles opportunités pour près de 500 millions de personnes qui vivent en Amérique du Nord », ont assuré la ministre canadienne des affaires étrangères, Mme Chrystia Freeland, et le représentant américain au commerce, M. Robert Lighthizer.
L’appellation anglaise de ce nouvel accord est United States Mexico Canada Agreement (USMCA). Quelles en sont les principales dispositions?

Le gouvernement de M. Trudeau a accepté d’assouplir son marché laitier pour les producteurs américains, en échange notamment du maintien du système d’arbitrage des litiges commerciaux. L’accord offre aux Etats-Unis un accès à environ 3,5 % du marché laitier canadien, évalué à 16 milliards de dollars. Le gouvernement fédéral canadien « va payer les producteurs laitiers canadiens pour toutes les pertes liées », a affirmé à l’AFP un haut responsable canadien.

Washington et Ottawa se sont également mis d’accord pour que le nouveau traité commercial contienne un chapitre sur l’environnement, une première depuis la création de l’ALENA en 1994, et conserve l’exception culturelle canadienne chère aux Québecois.

Le système des règles d’origines en matière de production automobile évolue peu. 2,6 millions de véhicules assemblés au Canada sont exemptés de douanes américaines. En revanche, les lourds droits de douane imposés à l’acier et à l’aluminium canadiens –parmi d’autres– par un président Trump soucieux de protéger la sidérurgie américaine restent en place pour le moment, malgré la colère d’Ottawa.

Plusieurs dates-butoir étaient déjà passées sans conclusion. Cette percée est intervenue quelques heures avant que quelque 8 millions de Québécois se rendent aux urnes, pour une élection législative provinciale à risque pour la famille politique de M. Trudeau. Les libéraux, au pouvoir depuis 15 ans, pourraient en effet être battus par la Coalition avenir Québec (CAQ). Les principaux partis québécois et les organisations d’agriculteurs défendent fermement le système de « gestion de l’offre », qui contrôle la production et le prix du lait et de la volaille et assure des revenus stables aux agriculteurs canadiens. Et le Québec produit environ les trois quarts du lait canadien.

Il convient d’ajouter que le Canada est le premier marché des Etats-Unis à l’exportation.

Au bout du compte les changements par rapport à l’ALENA, qui sont tous au bénéfice des Etats-Unis, sont surtout cosmétiques.

Le texte de l’accord conclu le 30 septembre a été soumis au Congrès américain dès sa conclusion. Cela permet de respecter un délai de 60 jours imposé par la loi avant la signature du document à la toute fin novembre par le président Donald Trump, le Premier ministre Justin Trudeau et le président mexicain sortant Enrique Peña Nieto dont les fonctions expirent le 30 novembre. Le nouvel accord commercial, même signé, doit être ratifié par les Parlements américain, canadien et mexicain pour entrer en application. Pour les Etats-Unis, si la signature de l’accord ne s pose pas de problèmes, il n’en est pas de même de sa ratification qui risque d’être laborieuse. Les Républicains se méfient des penchants protectionnistes du Président Trump. Quant aux Démocrates, il est peu vraisemblable qu’ils mettront de la bonne volonté pour aider Donald Trump à tenir l’une de ses promesses de campagne.

Si cet accord est une bonne nouvelle pour M. Trudeau, renforçant la position de son parti dans les élections provinciales du Quebec, il l’est également pour M. Trump qui est engagé dans un bras de fer avec la Chine pour réduire le déficit commercial américain. Si l’accord est ratifié par le Congrès, M. Trump aura clos le chapitre de la renégociation de l’ALENA avant les élections de mi-mandat en novembre.

Jean-Christian Cady