L’organisation de coopération de Shanghai à la croisée des chemins.
Le 17e sommet de l’organisation de coopération de Shanghai (Shanghai Cooperation Organization – SCO) s’est tenu à Astana (Kazakhstan) les 8 et 9 juin 2017.
Cette organisation créée à Shanghai en 2001 regroupe la Chine et la Russie et plusieurs républiques d’Asie centrale (Kirghizstan, Tadjikistan, Kazakhstan, et Ouzbekistan). Le SCO était vu comme un moyen de créer un condominium sino-russe sur l’Asie centrale, dont la Chine et la Russie pourraient tirer des avantages. Pour engager les Etats d’Asie centrale dans cette coopération, la Chine avait développé l’idée de créer une banque de développement et une zone de libre-échange. Moscou en revanche ne l’entendait pas de cette oreille et craignait que la Chine n’utilise ces moyens pour promouvoir son propre agenda et que le développement des relations de la Chine avec les républiques d’Asie centrale ne se fasse aux dépens de la Russie.
Ne pouvant pas utiliser le SCO pour arriver à ses fins, la Chine a conclu des accords bilatéraux avec les Etats d’Asie centrale, cela bien entendu sans être contrôlé ou freiné par Moscou. De plus, à partir de 2013-2014, la Chine a créé des institutions multilatérales dont elle est le centre comme la Banque Asiatique pour l’Investissement dans les Infrastructures (Asian Infrastructure Investment Bank) ou mis en œuvre des initiatives de grande ampleur comme la Nouvelle Route de la Soie appelée aussi One Belt One Road (OBOR) qui, sans être focalisées sur l’Asie centrale, l’incluent cependant et vident largement de sa substance le SCO.
C’est pourquoi Pékin a décidé de ne pas s’opposer à la proposition russe d’élargir à l’Inde l’Organisation de Shanghai, y mettant toutefois comme condition d’y inclure aussi le Pakistan. Au moment où les Etats-Unis paraissent se dégager des initiatives multilatérales, la Chine entend jouer un rôle accru. « Avec l’entrée de l’Inde, le SCO représentera 40 % de la population mondiale et près de 20 % du produit intérieur brut mondial » a déclaré Narenda Modi, le premier ministre indien. Toutefois il n’est pas douteux que l’entrée de l’Inde et du Pakistan aura un impact négatif sur la cohésion du SCO et sur sa capacité à prendre des décisions.
La position de l’Inde est ambiguë. D’un côté elle a souhaité depuis longtemps devenir membre du SCO pensant que cela l’aiderait dans deux de ses priorités nationales : l’interconnectivité et la lutte contre le terrorisme. D’un autre côté, l’Inde pense que le terrorisme sur son territoire est largement le fait du Pakistan, notamment en ce qui concerne le Cachemire, et qu’il est fort peu probable qu’en ce qui concerne le terrorisme dont l’Inde est victime, le SCO soit actif, compte tenu du fait que la Chine a toujours soutenu le Pakistan.
Au moment où la Russie ne peut plus participer à certaines initiatives internationales, du fait des sanctions résultant de l’annexion de la Crimée et de son rôle en Ukraine, elle voit dans le SCO un instrument permettant d’élargir son audience internationale. Elle souhaite donc élargir le SCO à tous les Etats d’Asie continentale et avoir une meilleure coopération régionale. Un premier pas en ce sens est le statut d’observateurs donné à l’Afghanistan, la Bielo-Russie, l’Iran et la Mongolie au sein de l’Organisation de Shanghai.
Jean-Christian CADY