Forum des Îles du Pacifique: Micronésie, macro enjeux
Le sommet régional à Pohnpei, l’un des 4 États Fédérés de Micronésie, a été riche en rebondissements, et se termine par des décisions importantes.
La Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, jusque là observatrices, ont été promues membres de plein droit du Forum
Et ce, largement grâce à l’appui de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande. Wellington a longtemps été opposé à l’intégration totale des deux territoires français, car leur politique étrangère reste du ressort de Paris. Mais John Key, le Premier ministre kiwi, l’a dit: « la Nouvelle-Zélande a changé de position avec le temps ». Et il a résumé ainsi les raisons de son soutien aux candidatures calédonienne et polynésienne :
« Ce que j’aime chez ces deux pays, c’est qu’ils ont des économies assez développées. Et ils sont plutôt actifs sur les dossiers qui comptent : le tourisme, les énergies renouvelables et la pêche par exemple. »
Lutte contre le changement climatique: l’Australie joue l’apaisement
Beaucoup de pays du Pacifique étaient très remontés contre la politique de réduction des émissions de CO2 de l’Australie, jugée largement insuffisante. Le précédent Premier ministre, Tony Abbott avait fâché des dirigeants océaniens en annulant la création d’un marché carbone en Australie et en retirant son soutien au Fonds vert pour le climat. Malcolm Turnbull est donc arrivé à Pohnpei avec l’intention de raccommoder les relations de l’Australie avec les pays du Pacifique: « Ce sont nos voisins et nous avons tout intérêt à soutenir leur développement et le rôle que joue l’Australie est très apprécié. Nous siégeons tous autour de la même table, entre égaux, que ce soit les pays plus puissant ou les pays plus petits. »
Mission réussie. Le Premier ministre a annoncé des fonds supplémentaires pour aider les pays du Pacifique à faire face au changement climatique. Malcolm Turnbull: « Nous débloquons 300 millions de dollars australiens sur les 4 années à venir. C’est 80 millions de plus que prévu, initialement. Sur ces 300 millions, 75 seront consacrés à l’aide aux pays du Pacifique qui subissent des catastrophes naturelles. »
Et Malcolm Turnbull l’a aussi souligné: l’Australie co-préside le Fonds Vert pour le climat, et elle ratifiera l’accord de Paris d’ici la fin 2016 ou début 2017.
La lutte contre la pêche illégale
Canberra va donner une vingtaine de bateaux aux pays de la région pour leur permettre de patrouiller l’océan et traquer les flottes de braconniers, mais aussi de mener des opérations de sauvetage et de sécurité nationale.
Fidji: une absence fracassante
Ratu Inoke Kubuabola a commencé le sommet du Forum en tant que ministre fidjien des Affaires étrangères, mais samedi, c’est Franck Bainimarama, le Premier ministre resté à Suva, qui a repris son portefeuille.
Franck Bainimarama continue de boycotter le Forum des Îles du Pacifique, depuis qu’il en a été exclu en 2009 (et réinvité en 2014). Le Premier ministre fidjien refuse toujours de siéger au forum tant que les deux poids lourds de la région, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, y seront admis. Il est donc resté à Suva, et il a envoyé à Pohnpei son ministre des Affaires étrangères, Ratu Inoke Kubuabola.
Mais même à distance, Franck Bainimarama a fait entendre sa voix au Forum des Îles du Pacifique: samedi, il a muté Ratu Inoke Kubuabola au ministère fidjien de la Défense (car l’ancien ministre a démissionné), et il a repris personnellement le portefeuille des Affaires étrangères.
Autre coup de théâtre: les Fidji se retirent des négociations sur PACER+. C’est l’accord de libre-échange entre les membres du Forum des Îles du Pacifique, dont le cadre a été défini en 2001. Les gouvernements australien et néo-zélandais ne seraient pas assez souples dans les négociations, d’après le ministre fidjien du commerce, Faiyaz Koya. La Papouasie Nouvelle-Guinée a déjà abandonné la table des négociations en août, estimant qu’il ne bénéficierait pas aux secteurs-clés de son économie.
Immigration: Malcolm Turnbull remercie Baron Waqa
Le Premier ministre australien et le Président de Nauru se sont rencontrés en marge du sommet du Forum des Îles du Pacifique.
Malcolm Turnbull l’a remercié d’accueillir une partie des réfugiés et des demandeurs d’asile de l’Australie: « Nous apprécions grandement (votre participation, NDLR), qui permet de sauver beaucoup, beaucoup de vie. C’est le plus important », a souligné Malcolm Turnbull.
411 demandeurs d’asile sont toujours au centre de rétention de Nauru, depuis 3 ans. Le gouvernement Turnbull répète que c’est la meilleure façon de décourager les candidats à la traversée, de l’Indonésie jusque dans les eaux australiennes, et qu’il n’y a donc plus de risques de naufrage, cela épargne des vies.
Mardi dernier, Nauru a refuse d’accorder un visa à un député indépendant australien, Andrew Wilkie, qui voulait savoir ce qui se passe vraiment au centre de rétention. Des documents internes obtenus par The Guardian Australia début août révèlent en effet des abus de toute sorte commis contre les migrants, y compris des enfants.
11/09 – Caroline Lafargue – http://www.radioaustralia.net