Quel avenir pour Taiwan ?

RPC – Divisions administratives

Source : https://chine.in/guide/regions-provinces_232.html

Contexte 

 La République de Chine Populaire (RPC) considère que Taiwan est une de ses provinces ce que rappelle le consensus de 1992.

Selon cet accord, la Chine continentale et Taiwan constitue une seule Chine dont l’objectif est la réunification sous l’égide d’un même état. Il définit les relations interdétroit.

Tout état ou toute entité doit y adhérer (c’est-à-dire reconnaître les ambitions de souveraineté de la RPC sur Taiwan) si il / elle entend entretenir des relations avec la RPC.

La loi anti-sécession du 14 mars 2005 mentionne expressément dans son article 2 que « Taiwan est une partie de la Chine ». L’article 8 stipule qu’en cas d’actions sécessionnistes en vue de l’indépendance de Taiwan, « l’Etat (la PRC) aura alors recours aux moyens non-pacifiques et autres moyens nécessaires pour protéger la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale de la Chine ».

Tsai Ing-wen tente lors de son discours d’investiture le 20 mai 2016 de rassurer Pékin en ne parlant pas d’indépendance, mais se garde bien de cautionner toute perspective de réunification.

Elle  dément, notamment, l’existence du consensus de 1992, où en 1992 lors d’une rencontre semi-officielle, Taïwan et la République populaire chinoise ont reconnu appartenir à une seule Chine.

Elle prône la fermeté face à Pékin et dirige le Parti progressiste démocratique, dont un courant pousse à l’indépendance.

Pour mémoire, Taiwan n’a jamais appartenu à la Chine Populaire. Si elle fut officiellement gouvernée par la Chine de 1683 à 1895, elle fut cédée au Japon, par le traité de Shimonoseki (1895), à la suite de la première guerre sino-japonaise. Ce dernier entreprend le développement de Taïwan, la dotant d’infrastructures importantes. En 1945, à la suite de la défaite japonaise, la République de Chine recouvre Taïwan. En 1949, le gouvernement de la République contrôlé par le Kuomintang s’y installe, après avoir perdu la guerre civile contre les communistes. Cette installation est accompagnée d’un transfert massif de population. À partir de 1950, après avoir perdu Hainan, la République de Chine ne contrôle plus que l’île de Taïwan et quelques autres territoires insulaires plus petits. Depuis Taiwan mène une politique indépendante.

Manœuvres d’intimidation

Depuis plusieurs mois, des exercices militaires (notamment aériens), sont organisés par l’Armée populaire de libération  (APL) aux abords de toutes les positions stratégiques de Taïwan. Les survols sont même qualifiés par l’Armée populaire de « manœuvres d’encerclement de l’île ».

Source : https://www.pressreader.com/france/le-figaro/20180115/281479276820118

En janvier 2017, les autorités de Pékin ont ouvert 4 nouveaux couloirs aériens dont l’un longe la ligne médiane du détroit de Taïwan, sans aucune consultation préalable. Cette décision unilatérale est une remise en cause du statu quo par l’utilisation de l’aviation civile, et en outre une manœuvre dangereuse pour la sécurité aérienne. L’OACI, interrogée, n’a pas donné suite. Doit-on voir un lien de cause à effet dans la nationalité chinoise de sa directrice générale ?

Extrait du discours de Xi Jinping du 20 mars 2018

« Chaque pouce de notre grande patrie est inséparable du reste et elle ne sera jamais démembrée. Tous les actes et complots destinés à diviser la mère patrie sont voués à l’échec, condamnés par le peuple et par l’Histoire » et « Les actes et les manœuvres visant à séparer le pays sont voués à l’échec, elles seront condamnées par le peuple et punies par l’Histoire ».

Il affirme souhaiter la réunification pacifique avec Taïwan.

Cette déclaration intervient au moment où les États-Unis adoptent le 16 mars 2018 une nouvelle loi  (Taiwan Travel Act) qui peut changer le caractère des liens entre Washington et Taipei et nuire aux relations Pékin- Washington. Elle vise en effet à encourager toutes les visites à quels que niveaux que ce soit entre les États-Unis et Taiwan (H.R.535).

Par ailleurs, le Taiwan Relations Act, en vigueur depuis le 1er janvier 1979, stipule que les USA s’engagent à «maintenir la capacité des États-Unis de résister à tout recours à la force ou à d’autres formes de coercition qui mettraient en danger la sécurité ou le système économique ou social, de la population de Taïwan ».

Réaction de Taiwan

La réaction de Taipei aux dernières déclarations de Xi Jinping ne s’est pas fait attendre.

«Nous ne nous intéressons pas à ce que les autres pays pensent de notre diplomatie. Nous n’avons pas l’intention d’arrêter nos efforts, ni de les relâcher», a immédiatement répondu Andrew Lee, porte-parole du ministère des Affaires étrangères de Taïwan, en soulignant que la Chine n’avait pas le droit de faire des «remarques irresponsables» concernant la politique extérieure taïwanaise.

Selon un sondage effectué fin 2017, seuls 14% des Taïwanais pensaient faire partie de la même nation que la Chine contre 50% à la fin des années 90.

Quelles menaces potentielles ?

Les quelque 1 000 missiles chinois pointés vers Taiwan sont bien une réelle source de menace alors que les Taïwanais ne souhaitent pas dans leur ensemble abandonner leur souveraineté au profit  du continent dont les institutions semblent à certains de plus en plus totalitaires.

Dans son discours du 20 mars,  Xi Jinping évoque la « punition de l’Histoire » et il se réfère alors à la conception de l’organisation du cosmos et des sociétés humaines que se faisaient, il y a plus de 2 000 ans, les légistes chinois.  Dans cette conception, le Prince était l’origine et le garant de l’ordre naturel dont l’ordre humain était une simple émanation. Dans un tel dispositif, ce sont les châtiments et les récompenses octroyés par le Prince qui sont les instruments du maintien de l’ordre social et naturel. Il faut donc que les sanctions du Prince s’exercent avec toute la rigueur et l’implacabilité d’un châtiment divin, d’une catastrophe naturelle, ou, dans le cas d’espèce, d’une sorte de divinité historique moins amène encore que la mythologique Clio, muse de l’Histoire.

Il est dans «l’intérêt fondamental» des Chinois de préserver «l’intégrité territoriale de la Chine» et de parvenir à sa «réunification complète», a par ailleurs prévenu Xi Jinping, avertissant que son pays n’accepterait jamais la séparation d’un seul pouce de son territoire.

Il  a toutefois assuré que la montée en puissance de la deuxième économie mondiale ne constituait «pas une menace» pour le reste de la planète. «Seuls ceux qui ont pour habitude de menacer les autres considèrent les autres comme une menace», a-t-il lancé, dans une allusion aux pays occidentaux, et en particulier aux États-Unis. «La Chine ne sacrifiera jamais les intérêts des autres pays pour assurer son propre développement», a ajouté le président chinois dans le contexte de nouvelles barrières tarifaires américaines.

Conclusion

L’option militaire est bien présente  du fait  l’intensification d’exercices près de Taiwan,  même si Xi Jinping a promis que la Chine n’imposera jamais sa volonté aux autres, reste à savoir si Taiwan fait partie des autres.

Le Global Times du 21 mars 2018 n’affirme-t-il pas que la Chine continentale doit se préparer à un clash dans le détroit et suggère l’envoi de navires et avions militaires au-dessus de la ligne médiane du détroit.

Devons-nous craindre une réaction intempestive des États-Unis et une escalade de la menace ?

L’accumulation de présences armées augmente le risque d’incidents susceptibles de « dégénérer ».

Xi Jinping envisagerait-t-il d’appliquer comme à Hong Kong le principe « Un état, deux systèmes » et de quelle manière…

(Sources : Le Figaro, sputniknew.com, Institut Thomas Moore, Wikipedia, www.congress.gov, taiwaninfo, le quotidien du peuple)

Article rédigé par Michèle BIETRIX, Louis CHATELIER et  Hélène MAZERAN