« Valeurs asiatiques et tentations européennes » / « Lee KuanYew ou les paradoxes de l’Asie triomphante »

Comment un tout petit pays peut-il engendrer un géant de l‟histoire ?, expression utilisée par Barack Obama  pour  rendre  hommage  au  génie  de  Lee  KuanYew  qui  a  dirigé  Singapour  pendant  une quarantaine d‟années.

5 millions d‟habitants, 800 km2, position éloignée de toute grande puissance économique.

A son indépendance, en 1965, Singapour « n‟était qu‟un port avec des entrepôts et quelques bâtiments administratifs hérités de la colonisation britannique. Son PIB par tête était d‟environ 2500 USD ; il a progressé de 7% par an de manière continuelle ». Aujourd‟hui, avec 56 000 USD par habitant, Singapour affiche la richesse la plus forte d‟Asie, à égalité avec les Etats-Unis, devant l‟Allemagne et le Japon. Le chômage y est de 2% environ, et 90% des habitants sont propriétaires de leur logement. A l‟embouchure du détroit de Malacca, passage maritime le plus court entre l‟Asie et l‟Europe, c‟est le 2ème plus grand port au monde derrière Shanghai (c‟est son activité essentielle). C‟est aussi devenu une place financière majeure (comme d‟autres ports, Hong Kong, New York, autrefois Venise).

Lee KuanYew a choisi dès 1959 l‟intégration dans les échanges internationaux et a fait appel aux investissements internationaux pour développer son industrie (choix imité dans les années 80 par Deng Xiaoping), et s‟orienter vers des activités à forte valeur ajoutée. Santé et éducation surtout ont été « l‟obsession de la fin de sa vie ». Les grandes universités occidentales ont des ancrages à Singapour (INSEAD, ESSEC, ESCPE pour les françaises).

Dirigeant  son  pays  « d‟une  main  de  fer »,  très  marqué  par  les  affrontements  interethniques  en Malaisie, il a réhabilité « les valeurs asiatiques » afin de consolider les liens de sa population d‟origines diverses (Chinois, Tamouls, Malais, Indiens …). Il a imposé l‟anglais comme langue officielle, de manière à constituer un ciment social pour une population qui n‟avait ni histoire commune, ni dessein collectif. La lutte farouche contre la corruption a permis une éradication rapide et quasi-totale du problème. Paternalisme et ordre social rigoureux ont été érigés en mode de gouvernement.

Certes ce n‟était pas un grand démocrate, les libertés individuelles n‟étaient pas prioritaires et constituaient  « une  perspective  à  long  terme »…..  Mais  lors  des  élections  de  2011,  les  partis d‟opposition ont obtenu 40% des votes, signe dévolution.

L‟auteur de l‟article fait un parallèle entre Singapour où les choix du Père fondateur sont remis en cause (au moins partiellement) et les Européens qui veulent le développement de l‟économie avec des tentations autoritaires ………..

23/03 – Jean-Marc Vittori/ Gabriel Grésillon – Les Echos (synthèse)