La nouvelle puissance des mers

« Les ambitions militaires de la Chine inquiètent ses voisins et les Etats-Unis ». Ces ambitions ne concernent pas seulement le Pacifique puisque en décembre 2015, lors du sommet Chine-Afrique de Johannesburg, a été annoncée l’installation à Djibouti de la première base navale chinoise à l’étranger. Elle sera terminée fin 2017 et aura pour mission d’assurer le soutien logistique des milliers de soldats chinois présents en Afrique dans le cadre des missions de maintien de la paix. « Cette implantation aiderait la Chine à faire face à ses obligations internationales visant à maintenir la paix et la stabilité régionale ». Mais en fait, la Chine se comporte en puissance maritime classique en « assurant la sécurité de ses approvisionnements et sa présence effective sur tous les océans ». Dans l’Océan indien, le « collier de perles » part de Kyaukpyu (Birmanie) jusqu’à Gwadar (Pakistan). « Le fermoir de ce collier » au-delà du détroit d’Ormuz est désormais Djibouti (détroit de Bab el Mandeb). « Recherche d’harmonie » entre les marines française et chinoise dans l’Océan indien, notamment en matière de lutte contre la piraterie. Cette petite Task Force chinoise a aussi remonté le Canal de Suez pour « engager des manœuvres rapides avec la flotte russe en Méditerranée orientale ». La marine chinoise cherche-t-elle à devenir une véritable force de haute mer ?

De leur côté, les Japonais construisent de gros porte-aéronefs  « pour  des  interventions humanitaires »… « Les Australiens vont passer commande d’un gigantesque contrat de sous-marins », les Indiens veulent pouvoir faire face à la menace chinoise, « l’ensemble des pays de la région commandent des armes », les Chinois »achètent aux Russes la totalité de ce que ceux-ci veulent bien leur vendre (y compris des missiles anti-aériens S-400.

Entre Pékin et Moscou, pas de perspective de « véritable alliance », mais les relations militaires s’intensifient ….. La crise en Mer de Chine se traduit par « la construction de récifs artificiels et des installations portuaires bien défendues sur les îlots les plus contestés, et dans une zone où passe entre le quart et le tiers du commerce mondial » (Cf. « L’Asie du sud-est à la confluence des océans », rapport d’information de Jean-Jacques Guillet et Gwenegan Bui, 2015). « Cette zone est un baril de poudre. Personne ne veut la guerre…, mais les bateaux et les avions se frôlent. On n’est pas à l’abri d’un incident qui pourrait très vite dégénérer ».

Dans le dernier rapport annuel du Pentagone au Congrès, l’évaluation des menaces militaires de Pékin place en n°1 le risque d’une guerre pour le contrôle du détroit de Taïwan, en n°2 les risques en Mer de Chine. « Le programme de modernisation militaire chinois s’oriente progressivement vers des investissements autorisant … des missions au-delà de la périphérie de la Chine, y compris la projection de puissance, la sécurité des voies de navigation, la contre-piraterie, les opérations de maintien de la paix l’assistance humanitaire et la réponse aux catastrophes ».

17/03 – Jean GUISNEL – Le Point