Thaïlande: la junte militaire transforme en profondeur la société

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En Thaïlande, la junte militaire qui s’est emparée du pouvoir lors d’un coup d’Etat en mai 2014 est plus que jamais en position de force après l’approbation le mois dernier par référendum d’un projet de Constitution rédigé sous sa supervision. Personne ne doute en Thaïlande que les militaires vont continuer à dominer le pays pour de nombreuses années à venir. Mais au-delà d’un simple contrôle de la direction du pays, on assiste à un phénomène nouveau dans le royaume : une militarisation en profondeur de la société.

Ce n’est pas la première fois que les militaires tiennent le pouvoir en Thaïlande. Il y a eu une douzaine de coups d’Etat dans le passé. Mais cette fois-ci, ils veulent aller plus loin et transformer la société thaïlandaise. On le voit dans de multiples domaines. Dans le domaine judiciaire, par exemple, les tribunaux militaires sont maintenant employés très fréquemment. Les tribunaux civils sont marginalisés.

Un régime devenu profondément militaire

La junte a aussi renversé la politique de décentralisation initiée il y a vingt ans. Elle a suspendu toutes les élections de représentants des communautés locales. Les responsables administratifs locaux sont désormais nommés par les militaires. Au niveau économique, un conseil composé d’officiers militaires supervise l’ensemble des entreprises d’Etat dont les conseils d’administration sont truffés d’hommes en uniforme.

On retrouve cette militarisation à tous les niveaux, dans le système pénitentiaire, dans le système des télécommunications et des médias audiovisuels et jusque dans les séries télévisées qui présentent des histoires romantiques dans les milieux militaires, sans doute pour leur donner subrepticement une touche de glamour. En un mot, les militaires contrôlent tout et sont partout présents.

Le système politique verrouillé par la junte

Jusqu’à présent, les militaires étaient contents d’intervenir en politique quand ils en ressentaient le besoin, soit pour protéger leurs intérêts, soit parce qu’ils considéraient que le gouvernement civil gérait le pays d’une manière qui leur déplaisait. Il semble qu’ils en soient désormais venus à la conclusion que les coups d’Etat faisaient mauvais effet, notamment sur le plan international, et qu’il valait mieux instaurer une structure permanente de contrôle. La Constitution approuvée en août va dans ce sens. Les militaires pourront contrôler le gouvernement en sous-main grâce à un Sénat nommé par leur soin, voire même pourront diriger le pays grâce à un Premier ministre issu de l’armée.

Une majorité des Thaïlandais, pour l’instant au moins, semblent accepter cette mainmise des militaires sur la société, parce qu’ils considèrent qu’elle apporte une certaine stabilité. Après dix ans de manifestations, de répression et de coups d’Etat, beaucoup de Thaïlandais en ont tout simplement assez des troubles. Et ils donnent priorité au calme et à l’ordre sur la démocratie.

12/09 – Arnaud Dubus – RFI