Actualité de novembre 2022

Le 2 novembre marque aussi la plus grave crise militaire depuis l’élection du conservateur Yoon Suk-yeol, partisan d’une approche dure vis à vis du nord après les années de dialogue menées par Moon Jae-in qui n’avait cependant déboucher ni sur un traité de paix, ni sur un accord de dénucléarisation. 54 missiles ont été tirés par la Corée du nord depuis début 2022, et le danger d’affrontements armés va croissant.

La Corée du nord a tiré le 2 novembre  une vingtaine de missiles balistiques, dont un est tombé près des eaux territoriales de la Corée du sud, et au-delà de la ligne de démarcation de 1953. La Corée du sud a riposté avec trois missiles air-sol envoyés vers la mer, suivis d’une centaine de tirs de l’artillerie nord-coréenne près des eaux territoriales du sud.

Le XXème congrès du PCC a été l’occasion le 3 novembre d’un remaniement de la direction du PC : les technocrates pro-marché ont été remplacés par des cadres connus pour leur loyauté. Quel sera l’impact de cette décision sur le plan économique ??? Les investissements énormes dans l’immobilier et les infrastructures ont entraîné une chute des prix des logements et des bureaux, d’où un risque de paralysie financière et une croissance économique de plus en plus ralentie.

Après les 12 visites en Chine en 16 ans d’Angela Merkel, celle d’Olaf Scholz à Pékin le 4 novembre juste après le XXème congrès du PCC est la première d’un chef d’Etat européen, la première d’un membre du G7 depuis la pandémie. Le chancelier allemand a refusé la présence d’Emmanuel Macron pour rencontrer Xi Jinping triomphant, après la prise de participation du Chinois Cosco dans le port de Hambourg. La position de Scholz est critique en Allemagne au sein de la CDU, et au sein de l’Union européenne par le Commissaire Thierry Breton. La Chine est un « rival systémique » qui ne partage pas les mêmes valeurs (question des Ouigours, soutien chinois à Moscou…). La position allemande de « cavalier seul » est regrettée, les européens ont intérêt à manœuvrer conjointement car la Chine a aussi besoin de l’Europe.

Le 5 novembre au moment où le nouveau Premier Ministre, Ishmael Kalsakau, prend ses fonctions, l’Etat subit une attaque de grande ampleur par des pirates informatiques. Dès le 30 octobre des fonctionnaires avaient remarqué des « bizarreries ». Mais quelques jours plus tard, c’est l’ensemble des services de l’Etat qui sont bloqués et un mois plus tard une situation normale n’est toujours pas rétablie. Les petites nations du Pacifique sont souvent ciblées par les hackers d’autant qu’elles ne disposent pas toujours de technologies modernes et sécurisées.

La COP 27  se tient du 6 au 18 novembre à Charm El Cheikh (Egypte). L’objectif est de limiter le réchauffement de la planète à 1,5° pour la fin du siècle. Elle réunit une centaine de chefs d’Etat et de Gouvernement pour le Sommet mondial sur le climat en application de l’Accord de Paris signé en 2015. Lors de la COP 26, l’an dernier à Glasgow, 210 chefs d’Etat et de gouvernement étaient présents… Le Président Biden est venu seulement le 11 novembre pour quelques heures, et a rejoint les positions prises pour des « efforts plus urgents que jamais » à faire en faveur du climat. Si 197 pays sont représentés, ni la Chine, ni l’Inde ne le seront au plus haut niveau. Xi Jinping qui s’est présenté en « militant » de la lutte contre le réchauffement climatique dès l’ouverture du XXème congrès du PCC, ne fait pas le déplacement de Charm El Cheikh…Or on pourra rappeler que la Chine produit 33% des gaz à effets de serre, contre 12,6% pour les Etats-Unis et 7,4% pour l’Europe… Après une première semaine décevante, l’’Egypte espère aboutir à un accord ambitieux, même si contenir la hausse du réchauffement climatique à 1,5° d’ici la fin du siècle a déjà été affirmé lors de la COP 26. La COP 28 se tiendra aux Emirats Arabes Unis, c’est à dire également dans un Etat producteur de gaz naturel. …

Alors que le Cambodge préside actuellement l’ASEAN, le sommet ONU-ASEAN se tient du 11 au 13 novembre à Phnom Penh en présence du Secrétaire-Général des Nations-Unies. Les sujets à l’ordre du jour : les tensions régionales et globales, l’urgence climatique et la situation au Myanmar. Le président Biden arrive le 12, après son escale à Charm El Cheikh pour la COP 27, la Chine est représentée par le Premier ministre Li Keqiang, l’Union européenne n’est pas présente. La décision de principe d’intégrer Timor oriental à l’ASEAN, devait être entérinée.

Les relations bilatérales en marge du Sommet devraient porter sur la guerre en Ukraine, la reconduction de l’accord sur les céréales… et viser à éviter une escalade du conflit entre l’Ukraine et la Russie.

Alors qu’ils ont déjà eu 5 conversations téléphoniques depuis janvier 2021 (ce qui montre pour eux l’importance du dialogue) et que leurs ministres des affaires étrangères Wang Yi et Anthony Blinken ont eu des échanges lors de l’Assemblée générale de l’ONU à New York le 23 septembre dernier, Joe Biden et Xi Jinping se rencontrent en tête-à-tête pour la première fois. Cette rencontre se situe pour Biden dans le contexte des résultats « réconfortants » pour les démocrates aux élections des « midterms », pour Xi Jinping dans celui du XXème Congrès du PPC qui a consacré sa toute-puissance. Après 3 heures d’échanges, la volonté d’apaisement est affichée, même si pour Pékin, « la modernisation n’est pas synonyme d’occidentalisation ». Selon Jack Sullivan, conseiller américain à la sécurité nationale, il s’agira de « gérer la compétition », « Nous allons nous concurrencer vigoureusement, mais sans entrer en conflit ».Le principal sujet de contentieux concerne Taïwan : « La question de Taïwan est au cœur des intérêts fondamentaux de la Chine, le fondement politique des relations sino-américaines, et la première ligne rouge à ne pas franchir ». Il est nécessaire d’éviter « les accidents, erreurs de calcul, qui pourraient déboucher sur une escalade… ». Anthony Blinken devrait se rendre à Pékin en janvier 2023. Anthony Albanese, Premier ministre australien, s’entretiendra aussi avec Xi Jinping, « dans l’espoir que cet échange soit constructif » (15 novembre, après-midi).

Le 15 novembre s’ouvre à Bali, sous présidence indonésienne, le sommet du G 20. Ce forum informel Nord-Sud de coopération a vu le jour en 1999 et ses Etats membres représentent 60% de la population mondiale, 80% du PIB mondial et 75% du commerce international. Y sont représentées les 20 économies les plus développées de la planète, 19 Etats et l’union Européenne. L’objectif est de trouver une solution à la crise alimentaire et énergétique mondiale. Mais les aspects politiques ne sont pas absents des discussions. « Nous devons mettre fin à la guerre, sans diviser le monde » a déclaré le Président indonésien Joko Wikodo dans son discours d’ouverture. Le Président Poutine, « retenu par un agenda contraignant en Russie », ne viendra pas, il sera représenté par son Ministre des Affaires étrangères Sergei Lavrov.

L’agenda du G20 a été perturbé par l’annonce de la chute de deux missiles « de fabrication russe » en territoire polonais, qui ont fait deux morts le 15 novembre au soir. Les dirigeants des pays du G 7 réunis en urgence autour de Joe Biden ont appelé à la prudence en attendant les résultats de l’enquête sur l’origine des missiles afin d’éviter tout risque d’escalade. Les Etats membres de l’OTAN ont tous exprimé leur solidarité avec la Pologne qui a relevé son niveau d’alerte.

5 774 prisonniers, dont 600 femmes, 3 anciens ministres de l’ancien gouvernement d’Aung San Suu Kyi et 3 ressortissants étrangers, ont été libérés le 17 novembre par la junte au pouvoir en Birmanie depuis le 1er février 2021. Les 3 étrangers sont arrivés à Bangkok : l’ancienne diplomate britannique Vicky Bowman, l’économiste australien Sean Turnell et le journaliste japonais Toru Kubota. Aung San Su Kyi dont le procès est en cours, reste incarcérée.

Les aviations américaine et japonaise effectuent le 16 novembre des exercices conjoints après le tir d’un nouveau missile intercontinental par la Corée du nord qui est tombé dans la ZEE du Japon près d’Hokkaido. Le 19 novembre, un bombardier américain B-IB a été déployé dans la péninsule à l’occasion d’exercices entre les deux alliés. Ces démonstrations de force de la part de Kim Jong-un seraient des « réponses » aux grandes manœuvres de l’opération « Tempête vigilante » menée par les forces aériennes et navales japonaises, sud-coréennes et américaines. Elles ont entrainé un surcroit d’inquiétude en Corée du Sud qui a vérifié l’efficacité de ses dispositions d’alerte.

Kamala Harris, Emmanuel Macron et Xi Jinping assistent au sommet de l’APEC Coopération Economique Asie-Pacifique) qui s’ouvre à Bangkok le 18 novembre. Emmanuel Macron, premier Président européen à être convié à un sommet de l’APEC, a invité à rechercher « un consensus croissant » contre la guerre en Ukraine qui est tout sauf « une crise régionale », « c’est aussi votre problème » a-t-il déclaré aux Etats membres de l’APEC. Alors que les tensions entre la Chine et les Etats-Unis s’accentuent, une priorité stratégique est accordée à la zone allant des côtes est-africaines aux côtes ouest-américaines, d’où le concept d’Indopacifique où la France est présente du fait de ses territoires insulaires et de son immense ZEE : elle est « un pays de la région ». Des entretiens entre le Président français et le Premier ministre australien ont porté sur une relance du partenariat stratégique avec l’Australie et sur une nouvelle offre de vente de sous-marins (mais concurrence de Saab au niveau européen).

Kim Jong-un a présenté le 19 novembre sa fille sur la base de lancement du missile intercontinental, le Hawsong-17. Comment interpréter cette présentation ? Est-ce une remise en cause du rôle joué précédemment par la sœur de Kim Jong-un, Kim Yo-jong ? Est- ce le signe de tensions intérieures en Corée du Nord ?

Les élections législatives se déroulent le 19 novembre en Malaisie où, pour la première fois, les jeunes de plus de 18 ans peuvent voter (après la réforme constitutionnelle entrée en vigueur en 2021), d’où une augmentation de 6 millions d’électeurs par rapport à 2018, soit 40% de l’électorat potentiel. Les résultats n’apportent cependant pas la stabilité attendue avec 73 sièges  de la coalition Perikatan Nasional, dirigée par l’ex-premier ministre Muhyiddin Yassin, et la coalition du Pakatan Harapan, arrivée en tête avec 82 sièges menée par Anwar Ibrahim.

Le 21 novembre marque la reprise des négociations entre le gouvernement colombien et l’ELN lors desquelles plusieurs pays y jouent un rôle de garant. Les Etats-Unis sont également invités à y participer comme ils l’avaient précédemment fait pour les FARC.

Le sommet de l’Alliance du Pacifique (dont les membres sont le Chili, la Colombie, le Mexique et le Pérou) est suspendu le 22 novembre par Andres Manuel Lopez Obrador, son hôte, en raison du refus du Parlement péruvien d’autoriser Pedro Castillo à sortir du pays. Ce sommet pourrait en conséquence se dérouler au Pérou en décembre. L’Equateur, dont le président Lasso est attendu à Mexico, souhaiterait y adhérer.

Le gouvernement chinois a ordonné le 24 novembre le confinement de 6 millions de personnes à Zhengzhou où se trouve l’immense usine de fabrication d’i-Phone de Foxconn. Cela a entraîné des scènes d’émeutes, les ouvriers n’hésitant pas à détruire les barrières, à défier la police anti-émeute et à fuir. Contrairement à la période antérieure à l’arrivée de Xi Jinping au pouvoir où on recensait des milliers de mouvements sociaux, aujourd’hui on a moins de visibilité ; mais les mécontentements sont très forts. Les images télévisées de la Coupe du monde de foot au Qatar montrant les spectateurs sans masque ont suscité la colère des Chinois. Une lettre ouverte sur WeChat demandant si la Chine est « sur la même planète » a été censurée rapidement.

Les élections locales du 26 novembre à Taiwan ont vu la victoire du Kuomintang qui remporte seize des vingt comtés et villes du pays, entrainant dans la foulée la démission de Tsai Ing-wen de la tête du Parti démocratique progressiste. Chiang Wan-an, arrière-petit fils de Tchang Kaï-chek, représentant du KMT a été élu marie de Taïpei.Ces élections sont-elles un test entre les deux grands partis, le Kuomintang (KMT) principal parti d’opposition, prônant une unification à terme avec la Chine continentale, et le Parti Démocrate Progressiste (DPP) au pouvoir pro-indépendance ? Les élections présidentielle et législative auront lieu en janvier 2024.Cela n’augure cependant pas le résultat de ces futures élections, 95% de la population est contre une annexion de l’île par la Chine.

Un air de Tiananmen flotterait-il sur la Chine ? Des manifestants, dont certains arboraient une feuille blanche, symbole de la censure, ont manifesté le 27 novembre à Shanghai, Pékin, Nankin, Harbin, Xi’an ou Wuhan après d’autres manifestations quelques jours auparavant à Zhengzhou. La population est plus que fatiguée par 3 ans de passe sanitaire, de tests PCR et de confinement (arbitraire ?). Certains en appellent à la démission de Xi Jinping dont la politique zéro-Covid est loin de faire l’unanimité. Mais que reste-t-il de Tiananmen 30 ans après si ce n’est la répression par la police dès le 28 novembre, les accusations contre les « forces aux motivations cachées » qui veulent causer le désordre dans l’Empire du milieu ? Car se remettre en cause serait perdre la face.

Jiang Zemin est mort le 30 novembre à l’âge de 96 ans à Shanghai, dont il fut le maire en 1985 avant de devenir en juin 1989 le secrétaire général du PCC et en novembre de la même année président de la commission militaire centrale du Parti. En 1993, il cumule ces 2 fonctions avec celle de président de la République. Sous son mandat (1993 – 2003), un certain capitalisme débridé s’installe dans le pays où la théorie des « 3 représentation » vise à intégrer les élites économiques au sein du PCC. C’est sous sa présidence, en 1997, que Hong Kong est rétrocédé à la Chine qui en 2001 devient membre de l’OMC.